
Lettre à un ami
Peut-être y a-t-il un chemin
où l’esprit, faisant choix d’humilité,
se souvient que nous ne sommes rien.
Si insignifiants
que l’auteur de notre souffle
nous abandonnant à son silence
n’est peut être rien lui-même
ou, simplement amour
Peut-être faut-il se dire que,
notre créateur - s’il fut - est :
soit cruel,
soit très malhabile,
pour nous avoir laissés là,
sans plus d’explications
sur notre raison d’être.
Quel intérêt, alors,
à vouloir le chercher encore ?
Alors,
alors peut-être,
pouvons-nous renoncer à l’absolu :
ni âme sœur,
ni transcendance mystique.
Le mental,
abandonné à lui-même
et à ses fictions de complétude.
Rappelé à ce qu’il est :
un conteur d’histoires
auxquelles nous aimons croire,
mais dont il faut se souvenir,
toujours,
qu’elles ne sont que récits
pour habiter le monde.
Un compagnon de route,
au même titre que notre corps.
Alors,
alors peut-être,
l’homme,
revenu à sa plus humble mesure,
reconnaissant sa difficulté à être,
à faire mieux,
à être plus,
peut commencer à vivre.
À s’accueillir tel qu’il est.
À partir de là où il se trouve,
c’est-à-dire,
sans doute,
nulle part.
Alors,
alors seulement,
en avançant pas à pas
dans l’infime de son propre sentier,
en admettant qu’il est moins doué que les autres
mais que c’est son chemin.
En écoutant ses peurs
lui murmurer des vérités
sur lui,
sur l’autre,
à l’aider, peut-être,
à comprendre
où mieux poser la main,
où mieux poser l’amour.
Alors,
alors peut-être,
a-t-il enfin quelque chose à partager
avec un(e) semblable.
Lui faire une place en soi,
avec douceur.
Et, qui sait,
accéder à cette joie,
présence silencieuse,
qui habite
l’épaisseur du réel.